À l’approche du scrutin des 30 mai et 6 juin, Paris Lights Up donne la parole aux six candidates et candidats qui auront l’opportunité de représenter la quinzième circonscription de la capitale à l’Assemblée nationale. On retrouve aujourd’hui Sarah Gardent, agente de Pôle emploi et habitante du quartier Saint-Blaise, soutenue par le Parti ouvrier indépendant démocratique (POID).
Si vous êtes élue députée dans le cadre de cette élection législative partielle et que vous deviez choisir trois priorités pour votre mandat, quelles seraient-elles ?
Je n’ignore pas que dans la Cinquième République, le parlement n’a aucun pouvoir. En effet, le pouvoir décisionnaire est concentré dans les mains du président de la République et de son gouvernement. C’est pourquoi nous sommes pour une assemblée constituante qui serait à même de décider par elle-même.
Dans ce cadre, je pense que la priorité serait de réquisitionner les 560 milliards qui ont été octroyés aux banques et aux patrons depuis mars 2020. Ces milliards pourraient ainsi être utilisés pour les besoins immédiats de la population pour faire face à cette situation de crise sanitaire, comme par exemple une véritable politique de vaccination de masse, la réouverture du nombre de lits nécessaires dans les hôpitaux, l’embauche et la formation massive de personnels soignants. Mais aussi l’embauche massive d’enseignants, de personnels en charge du nettoyage et de la désinfection des locaux, la construction de bâtiments nécessaires à la reprise de l’enseignement dans de bonnes conditions… Ce serait aussi l’interdiction des licenciements, le retrait de la réforme de l’assurance chômage, le maintien de 100% de la rémunération des travailleurs en chômage partiel et le retrait de la réforme des retraites.
Mais tant que nous restons dans cette situation, c’est le gouvernement en finalité qui décide de tout. En passer par l’assemblée constituante pose nécessairement la question de la rupture avec Macron et sa politique, la rupture avec les institutions de la Cinquième République qui donnent les pleins pouvoirs à un individu, et la rupture avec l’Union européenne qui impose la réduction des budgets.
Le 20ème arrondissement concentre aujourd’hui bien des difficultés : taux de contamination au Covid-19 parmi les plus élevés de la capitale, nombre de personnes sans abri toujours aussi révoltant, problèmes liés au mal-logement et à la hausse des prix de l’immobilier… Malgré tout, la participation locale aux dernières élections a été particulièrement faible. Comment faire en sorte que les citoyennes et les citoyens croient en la capacité de la politique en vue de changer leur quotidien ?
Les populations les plus précaires sont effectivement les premières victimes de la politique de Macron et son gouvernement, une politique menée par tous les gouvernements précédents, une politique de destruction de nos droits, des services publics, une politique de répression.
Les travailleurs, les jeunes, les chômeurs, les retraités sont, à juste titre, très sceptiques quant à l’incidence des différentes élections sur leurs conditions de vie concrètes. Et pour cause, les institutions de la Cinquième République permettent de faire et de défaire des lois à coup de 49-3 ou de décrets sans même passer par la voie parlementaire.
Une assemblée constituante imposée par la majorité et constituée de délégués élus, mandatés et révocables serait à même de permettre au peuple de décider pour lui-même. Pour notre part, nous y soumettrions un gouvernement ouvrier qui prendrait les mesures d’urgence nécessaires aux travailleurs dont j’ai parlé précédemment.
Face au duel Macron-Le Pen qui semble de nouveau se profiler à l’horizon, un nombre grandissant de militantes et de militants progressistes en appellent aujourd’hui à une véritable union pour 2022. Or les échéances à venir, en premier lieu les régionales, ne semblent guère porteuses d’espoir de ce point de vue. Quelles seraient les conditions pour que les formations de gauche mettent leurs désaccords de côté et s’entendent sur la formation d’un nouveau Front populaire ?
Je ne sais pas ce que vous entendez par Front populaire, pour notre part nous sommes favorable à un gouvernement ouvrier. C’est pour cela que nous construisons un parti ouvrier. Un gouvernement ouvrier qui prend les décisions d’urgence vitales à la population, qui n’hésite pas à réquisitionner les chaînes de production pour produire des vaccins en masse pour tous ceux qui le réclame, qui distribue les masques, qui réquisitionne les brevets… Un gouvernement d’unité ouvrière, donc un gouvernement de rupture. Nous combattons pour l’unité de tous ceux qui sont sur ce terrain d’unité ouvrière, sur le terrain de la lutte des classes.
Comme n’importe quel travailleur, jeune, chômeur, retraité de ce pays je considère que nous sommes dans l’urgence. L’urgence, c’est de rompre avec Macron et sa politique maintenant, tout de suite. Nous ne pouvons pas attendre 2022. Cela veut dire rompre avec la politique d’union nationale qui a conduit à ce que l’Assemblée nationale vote à l’unanimité (tous les députés de l’extrême droite à l’extrême gauche) l’octroi de 343 milliards aux banques et aux patrons le 19 mars 2020. Depuis ces 343 milliards sont devenus 560 milliards, et n’ont servi qu’à licencier en masse (chez Renault, Alinéa, et tant d’autres) et augmenter les profits des actionnaires.
Nous sommes partisans de l’unité sur cette base, c’est pourquoi le parti ouvrier indépendant démocratique est partie prenante de la campagne « Dehors Macron et sa politique, le plus tôt sera le mieux » avec de nombreux militants de différentes organisations syndicales (CGT, FO, FSU…) et politiques (LFI, PC, PS, NPA…). L’appel regroupe déjà plus de 13 000 signatures, et une rencontre nationale des comités pour l’unité a regroupé 300 délégués de toute la France, d’entreprises et de localités diverses. Une délégation permanente constituée de tous les délégués qui le souhaitent se réunit tous les mois pour poursuivre cette campagne, proposer des initiatives et prolonger de travail d’unité. L’appel est disponible sur internet et auprès de tous les militants et travailleurs qui prennent part à cette campagne.
Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur vos liens, votre rapport personnel, avec le 20ème arrondissement?
Je suis habitante du quartier Saint Blaise depuis plusieurs années, comme plusieurs camarades de mon comité POID. Nous diffusons notre journal La Tribune des Travailleurs toutes les semaines sur les différents marchés du quartier (boulevard Davout, rue Belgrand, place de la Réunion…), et organisons du porte-à-porte pour aller à la rencontre de nos voisins.
Nous sommes très bien accueillis, et de nombreux habitants du 20eme ont signé l’appel « Dehors Macron et sa politique, le plus tôt sera le mieux », achètent et lisent notre journal.
Pourriez-vous nous citer des adresses ou initiatives locales qui vous inspirent ?
Beaucoup de lieux sont remarquables dans le 20ème. Mais deux me viennent particulièrement en tête, en lien avec l’actualité. Le premier est le Théâtre National de la Colline, parce que c’est un lieu culturel d’exception et parce qu’il est en ce moment occupé par des travailleurs du spectacle affectés par la crise sociale. Ils se battent pour la réouverture des lieux de culture et contre la réforme de l’assurance chômage.
Le deuxième, c’est le Mur des Fédérés, situé dans le cimetière du Père Lachaise. Le POID a pris l’initiative d’aller manifester le 20 mars dernier devant le Père Lachaise pour les 150 ans de la Commune de Paris. Cette manifestation n’était pas un simple hommage commémoratif, mais une initiative pour réaffirmer l’actualité et je dirais même l’urgence d’un gouvernement ouvrier. Un gouvernement ouvrier qui, comme l’a fait celui de la Commune, prendrait des mesures immédiatement pour protéger la population de cette crise sanitaire et sociale.
Agente de Pôle emploi, vous faites aujourd’hui vos débuts en tant que tête de liste d’une élection. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager en politique ?
Comme nombre de mes collègues et comme la majorité des travailleurs, je suis révoltée par la politique de ce gouvernement comme des précédents.
Pour prendre un exemple d‘actualité, et que je connais bien : Macron et son gouvernement ont décidé d’aller au bout de leur réforme de l’assurance chômage. Avec cette réforme, c’est 1,1 millions de chômeurs qui vont voir leurs allocations chuter de 43% en moyenne ! C’est scandaleux ! C’est meurtrier ! Des centaines de milliers de famille vont être plongées dans la misère alors que nous sommes déjà dans une situation de crise sans précédent.
Le gouvernement entend imposer ces nouvelles règles pour réaliser 1,3 milliards d’euros d’économie par an sur le dos des chômeurs, alors qu’il offre 560 milliards aux banques et aux patrons. Il faut en finir avec cette politique destructrice et meurtrière, en finir avec ce système d’exploitation.
Parmi toutes et tous les candidates et candidats, pourquoi seriez-vous la meilleure représentante de la 15ème circonscription de Paris?
Notre candidature est une candidature de rupture, de rupture avec Macron et sa politique, de rupture avec les institutions. Une candidature qui pose le problème d’une assemblée constituante par et pour le peuple.
Mettre au centre la réquisition des 560 milliards pour les utiliser immédiatement pour les besoins des travailleurs, des chômeurs, des jeunes, des retraités, c’est le sens de notre candidature. Les institutions de la Cinquième République nous impose de présenter une tête de liste, en l’occurrence moi – cela aurait pu être un autre travailleur qui partage cette vision.
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Pour suivre la campagne de Sarah Gardent :
Site du POID · La Tribune des Travailleurs (publication du parti)
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À l’approche de cette élection législative partielle des 30 mai et 6 juin, notre rédaction interroge toutes les personnalités candidates dans une série d’entretiens-portraits :
– François-Marie Didier, conseiller de Paris de l’opposition, élu du 20ème, et directeur développement territorial dans une grande entreprise du secteur de l’énergie, candidat avec le soutien des partis LR et Libres.
– Lamia El Aaraje, conseillère de Paris de la majorité, élue du 20ème, et docteure en pharmacie, candidate avec le soutien du Parti socialiste, du Parti radical de gauche, de République et Socialisme.
– Sarah Gardent, agente de Pôle emploi, candidate avec le soutien du Parti ouvrier indépendant démocratique.
– Antoinette Guhl, conseillère de Paris de la majorité, élue du 20ème, et directrice d’une structure dédiée au recyclage et au réemploi, candidate avec le soutien des partis EELV et Génération·s.
– Danielle Simonnet, conseillère de Paris de l’opposition, élue du 20ème, et psychologue de l’Éducation nationale, candidate avec le soutien de la France insoumise.
– Thomas Roger, infirmier en service de gériatrie, candidat avec le soutien du Parti communiste.
Les partis de la majorité présidentielle LREM-MoDem ne présentent pas de candidate ou de candidat dans le cadre de cette élection.
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Photographie d’illustration : Sarah Gardent
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