Après l’éclosion des cygneaux, bientôt un sanctuaire animalier à la Villette ?

L’arrivée des petits cygnes couvés sur les rives du canal de l’Ourcq pendant le confinement est venue rappeler l’attachement des Parisiens à la nature en ville. Pour offrir un refuge durable aux animaux de la capitale, l’association Paris Animaux Zoopolis propose de sanctuariser la darse du Rouvray, un canal discret bordant le parc de la Villette.

Après s’être relayés des semaines durant pour veiller sur leurs œufs, Odette et Siegfried ont donné naissance à leurs premiers cygneaux le 20 mai dernier. Les adorables petits sont très vite devenus les nouvelles vedettes du quartier ! Il faut dire que les rives du canal de l’Ourcq (XIXème arrondissement) semblent aujourd’hui faire l’unanimité auprès des promeneurs désormais déconfinés, notamment avec le maintien de la fermeture des parcs voisins des Buttes-Chaumont et de la Villette.

La situation n’est donc pas vraiment de tout repos pour les nouveaux parents. Riverains et passants regrettent également la présence de déchets autour du radeau végétalisé sur lequel les cygnes ont installé leur nid, autre évidence de la nécessité d’un refuge plus durable et à l’écart de la présence humaine.

Dans cette optique, l’association Paris Animaux Zoopolis a contacté la mairie de Paris et le maire du XIXème arrondissement François Dagnaud afin de proposer la “sanctuarisation de la darse du Rouvray” pour accueillir la famille de cygnes comme bien d’autres animaux parisiens. Pénélope Komitès, adjointe d’Anne Hidalgo responsable de la biodiversité et de la nature en ville, a indiqué à l’association que la maire de Paris y était favorable :

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Contactée par notre rédaction, Amandine Sanvisens, présidente de Paris Animaux Zoopolis, a précisé qu’une “étude de faisabilité” réalisée par les services de la ville était en cours concernant l’aménagement du site. La darse du fond de Rouvray (c’est son nom complet) n’étant de toute évidence pas le canal parisien le plus connu, voici de plus amples détails sur ce projet et ses implications.

Réaménagée dans les années 2000, la darse est un canal discret qui s’étend sur 250 mètres depuis le pont tournant qui relie le quai de la Marne au parc de la Villette. Sorte d’impasse fluviale, elle est bloquée par la rue Adolphe Mille au sud, et bordée à l’ouest par le quai de la Garonne, dont elle est séparée une grille d’environ deux mètres de hauteur.

 

 

Du côté du parc de la Villette, plusieurs bâtiments et hangars liés aux services des canaux s’étendent au nord du canal ; leurs docks en béton ne semblent pas empêcher toute une colonie de canards d’en apprécier les rivages. Plus bas, quelques structures de la “cité administrative” de la Villette émergent derrière une végétation florissante. Il semblerait que certaines d’entre elles soient aujourd’hui utilisées en tant que sites de tournages.

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Entre les deux, une grande partie du rivage est recouverte d’arbres, arbustes et plantes en tous genres. L’endroit semble en effet idéal pour les animaux à la recherche d’un peu de calme. Amandine Sanvisens nous explique que “la darse de Rouvray constitue déjà l’habitat de nombreux animaux liminaires : canards, cygnes, foulques, poissons…” La présidente de Paris Animaux Zoopolis rappelle d’ailleurs qu’un couple de cygnes y faisait déjà son nid “avant la pose du barrage à déchets flottant” qui a rendu l’accès au canal plus difficile.

L’association défend notamment la cause de ces animaux dits liminaires, qui vivent en partie auprès des communautés humaines, y compris dans les plus grandes villes de la planète. À Paris, pigeons, rats, canards, poissons, moineaux et même renards vivent ainsi à nos côtés.

Que propose l’association à la maire de Paris en vue d’offrir un nouveau refuge à tous ces animaux ? Le principal avantage du site de la darse du Rouvray est d’être “déjà peu accessible au grand public”. Paris Animaux Zoopolis souhaite sécuriser le canal en interdisant plus explicitement son accès, de même que la pratique de la pêche sur toute sa longueur. Des “panneaux signalétiques et clôtures adéquates non-franchissables” viendraient compléter les installations déjà en place.

Autre priorité du projet, rendre le site aussi agréable que possible pour les animaux eux-mêmes, c’est à dire l’appréhender avant tout en tant qu’habitat. L’association propose ainsi “la pose d’un ou de plusieurs radeaux végétalisés sur ce canal, et non au pont de Crimée, très passant, profitant aux poissons et aux oiseaux”. Parmi les autres mesures suggérées, une attention portée à la végétation sur les deux rives du canal, un contrôle de l’oxygénation et de la propreté de l’eau , ainsi que la création d’un “refuge LPO” qui pourrait prendre la forme de nichoirs.

Paris Animaux Zoopolis demande enfin “la prise en considération de la condition animale comme critère fondamental dans les prises de décision concernant ce lieu”, appelant notamment à “solliciter des spécialistes en amont” — reprenant l’exemple de l’installation du barrage à déchets à l’entrée du canal “qui pénalise certains animaux, notamment les cygnes, qui ont des difficultés pour le franchir”.

Il s’agirait du premier sanctuaire revendiqué dans l’intérêt des animaux liminaires à Paris. Amandine Sanvisens précise qu’il n’y aurait “pas besoin, sauf cas exceptionnel, de les nourrir. Il s’agirait justement de ne pas intervenir, en dehors du nettoyage de nos pollutions”. D’après elle, l’initiative “se rapproche de ce que font certaines associations en achetant des terrains plusieurs hectares de forêt pour sanctuariser, et notamment pour protéger les animaux sauvages de la chasse. La différence est que notre projet est au cœur d’une ville”.

La sanctuarisation vise à faire de la darse du Rouvray un lieu “calme, sécurisé, sain” qui pourrait bénéficier à tous les animaux parisiens, qu’ils soient simplement de passage ou résidents de longue date du quartier de la Villette. Son cadre pourrait d’ailleurs bien inspirer d’autres espèces en vue de suivre l’exemple d’Odette et Siegfried.

La configuration des lieux laisse même espérer une extension du sanctuaire sur la terre ferme en direction du parc : au vu de leur état de conservation parfois relatif, tous les bâtiments qui bordent le canal sont-ils aujourd’hui indispensables ? On se plaît en tout cas à imaginer ce nouveau havre de paix pour tous nos amis parisiens à poils, à écailles et à plumes ! D’autant plus que ces derniers pourront toujours se laisser admirer sur les canaux de la Villette avant de rejoindre leurs nids dès qu’ils le souhaiteront.

 

 

 

Photographie d’illustration : trois des cygneaux du canal de l’Ourcq et l’un de leurs parents, Paris 19° – Mai 2020
Toutes les photographies © Paris Lights Up

 

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