Quatre mois après une première “marche pour la vérité et la justice” en soutien aux trois mineurs percutés par une voiture de police alors qu’ils circulaient en scooter près de la place de la Réunion (20e), une “soirée de mobilisation et de soutien à Safyatou, Salif, et Ilan” est organisée ce mercredi 13 septembre.
“Rompre l’isolement pour que cela ne se reproduise plus” : les familles et soutiens de ces trois jeunes du quartier seront de nouveau réunis demain pour évoquer l’évolution de leur état de santé, l’avancée de l’enquête, et alerter sur la brutalité policière qui s’est abattue et continue encore de sévir contre des mineurs. Organisée à la Flèche d’Or, à deux pas des lieux où se sont déroulés les événements, la soirée rassemblera notamment “les familles des victimes, des associations de terrain qui luttent quotidiennement auprès des jeunes du 20e arrondissement, des avocats, des collectifs de mères, et des militants aguerris sur ces questions”.
Âgés de 17, 14, et 13 ans au moment des faits, Safyatou, Salif, et Ilan avaient été percutés par des agents de police véhiculés à l’angle de la rue de Bagnolet et de la rue de Lesseps, alors que les mineurs circulaient sur un scooter. Ces derniers avaient été hospitalisés en raison de leurs blessures, la plus âgée ayant même vu son “pronostic vital engagé pendant plusieurs jours”. Les trois agents impliqués avaient été suspendus par le préfet de police, et leur garde à vue confirmée par le parquet. L’un d’entre eux a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire le 21 avril. Les actions des agents de police, de même que leur attitude menaçante envers les témoins, avaient été documentées par les rédactions de Mediapart et Street Press. “Les policiers ont menti et tenté de camoufler cet acte délibéré en accident de la route, contredits par plusieurs témoins. Lesquels ont été intimidés, menacés”, s’indigne le comité Vérité et Justice pour Safyatou, Salif, et Ilan.
“Des conséquences gravissimes sur les enfants, sur leur santé physique et morale”
“Safyatou a passé plus de deux mois à l’hôpital”, détaille dans une tribune le collectif de soutien aux trois jeunes. “Si son état de santé s’est amélioré, il faut ici rappeler la gravité des blessures et donc des opérations lourdes qu’elle a dû subir : estomac perforé, intestin abîmé, ce qui a nécessité une ablation d’une partie de cet organe, rein et poumon touchés, côtes cassées, fractures à la colonne vertébrale.” Alors que les deux autres enfants ont respectivement subi une blessure au foie et une fracture au genou, les obligeant à un suivi médical régulier, leurs soutiens dénoncent un “acte criminel des policiers [qui] a des conséquences gravissimes sur les enfants, sur leur santé physique et morale”. Pour eux, “on ne sort pas indemne d’une ‘tentative d’assassinat par personne dépositaire de l’autorité publique‘ intitulé de la plainte déposée au nom de la famille par Maître Arié Alimi”.
Protestant contre les faibles conséquences pour les trois policiers concernés, avec un seul des agents mis en examen pour “accident volontaire ou involontaire ayant entraîné des ITT supérieures à 8 jours et à 30 jours sur mineur” et pour “faux en écriture publique”, les membres du collectif assurent que les occupants du véhicule ont “refusé d’obtempérer aux ordres de leur hiérarchie exigeant, par radio, qu’ils stoppent la poursuite du deux roues, laquelle aura causé des dégâts irréversibles dans la vie de ces trois enfants et de leur famille. Aujourd’hui, l’enquête continue”. D’après le comité de soutien à Safyatou, Salif, et Ilan, qui a également lancé une cagnotte de soutien pour “couvrir les frais de justice, de santé, et de thérapies”, l’événement de ce mercredi 13 septembre sera également “un moment d’information sur nos droits et de préparation de la grande manifestation unitaire du 23 septembre contre les violences policières, le racisme systémique, et pour la défense des libertés publiques”.
Une marche “contre le racisme systémique, les violences policières, et pour la justice sociale” prévue samedi 23 septembre
Deux mois et demi après le meurtre de Nahel Merzouk, 17 ans, par un tir policier à Nanterre, et alors que plusieurs nouveaux cas de violences commises par des agents ont été révélés au cours de l’été, l’événement se donne également pour objectif de rappeler les discriminations que subissent au quotidien les habitants de certains quartiers. “Dans notre arrondissement, comme dans tous les quartiers populaires, nous connaissons le rapport inquiétant, raciste, constant, de la police avec les habitants, notamment les jeunes Arabes ou Noirs, nous savons l’ampleur des crimes policiers”, assurent ainsi les membres du collectif basé dans le 20e, endeuillé l’an dernier suite à une intervention qui a coûté la vie à Boubacar et Fadigui, deux jeunes hommes qui y avaient grandi. Ce rendez-vous du 13 septembre fera office de “soirée de préparation” avant la marche qui aura lieu dix jours plus tard au départ de la gare du Nord (10 arrondissement), à l’appel de nombreux collectifs, syndicats, partis politiques de gauche, et associations.
“Soirée de mobilisation et de soutien à Safyatou, Salif et Ilan”
Mercredi 13 septembre 2023 – À partir de 19h
La Flèche d’Or – 102 bis rue de Bagnolet, 75020 Paris
flechedor.org
Photographie : Marche “Vérité et Justice pour Safyatou, Salif et Ilan” du 7 mai 2023. Paris 20e.
© Jérémy Torres