Aux côtés des féministes, des personnes exilées et de toutes celles et ceux qui manifestent pour leurs droits, la photographe montreuilloise Noémie Coissac témoigne à travers son objectif de l’engagement et des luttes populaires contre les injustices de notre époque.
Nous vous proposons de découvrir une sélection de clichés réalisés au cours de ses reportages, notamment à Paris et en Seine-Saint-Denis. Alors que le projet de “loi sécurité globale” débattu actuellement par les parlementaires met en danger le statut et le travail des photojournalistes, nous lui avons également posé quelques questions.
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Paris Lights Up : Est-ce que tu pourrais nous présenter rapidement ton parcours et ta démarche photographique ?
Noémie Coissac : J’ai une formation de cadreuse, mais ma passion pour la photo m’a vite rattrapée. J’ai combiné tournages et photo en étant photographe plateau. Mes convictions personnelles font que je mêle maintenant photo et militantisme. Je fais partie d’une agence de photojournalisme depuis presque deux ans et je photographie les luttes, les projets sociaux et engagés.
Ma démarche est d’essayer de rendre visibles de façon positive et artistique celles et ceux que l’on voit peu, que la société “cache” (veut cacher), montrer qu’iels existent, ont des revendications à faire entendre et des vies sur lesquelles on doit s’arrêter. Je cherche aussi à témoigner des injustices que je vois, et d’essayer de montrer toutes les initiatives positives et solidaires qui se passent.
Avec le projet de “loi sécurité globale” examiné par le parlement, la situation est aujourd’hui particulièrement grave pour les photojournalistes. En tant que photographe couvrant régulièrement des manifestations, quel est ton ressenti ?
C’est dramatique, je suis en colère ! On ne se sentait déjà pas en sécurité sur les manifs où rassemblements (et en général), maintenant c’est encore pire. L’état policier facho et raciste s’installe, de cette manière personne n’est en sécurité, mais au contraire en danger. Il faut signer cette pétition, c’est important.
Et comme il est écrit : “si vous décidez de maintenir cette loi, sachez que malgré les risques de poursuites, nous ne la respecterons pas, nous ne lâcherons pas nos appareils photos et nous ne nous tairons pas”.
Peux-tu nous parler de quelques reportages qui t’ont particulièrement marquée ?
Les reportages qui me marquent et me choquent systématiquement sont les évacuations de campements de personnes réfugiées. Lundi soir dernier, j’étais à République lors de l’occupation par les personnes demandant un hébergement d’urgence, et j’ai vraiment été choquée par ce qu’il s’est passé. Les violences policières, l’horreur de leurs actes et paroles me répugnent. J’ai été très émue lors de ce reportage, émue par des regards, des sourires qui contrastaient tellement avec ce qu’il se passait deux mètres plus loin.
Tu as également eu l’occasion de couvrir des événements sous des horizons plus lointains. Tu pourrais nous en dire un peu plus ?
Les pays comme l’Ukraine, la Russie, la Biélorussie m’intéressent beaucoup et j’y suis très attachée. J’ai des origines russes, de la famille à Saint-Petersbourg, et photogéniquement j’adore l’ambiance.
Je suis aussi très solidaires des personnes LGBTQI vivant dans ces pays et se battant pour leurs droits. Je suis allée suivre la première Pride d’une ville ukrainienne, Kharkiv, c’était très marquant. Leur Pride était vraiment un combat et je suis fière d’y avoir assisté.
Tu vis à Montreuil où tu as suivi de nombreuses initiatives et luttes solidaires, par exemple au foyer des travailleurs sans papiers.
Les travailleurs sans-papiers de Montreuil ont été expulsés du foyer Bara pour être relogés dans un squat insalubre, où il vivent à plus de 250. La vie y est difficile, la mairie ne s’occupe pas d’eux. Heureusement il y a des associations montreuilloises qui font de temps en temps de la distribution de repas, mais il serait bien que le maire de Montreuil s’occupe de chacun d’eux et les reloge dans de vrais logements.
Tes clichés font l’objet d’une exposition à Montreuil jusqu’à fin décembre. Pourrais-tu nous décrire ce projet ?
Quelques-unes de mes photos sont exposées à la Maison des Femmes de Montreuil. C’est un lieu féministe et solidaire. J’ai suivi le groupe collages féminicides Montreuil lors d’une session de collages plurilingues. Les colleuses ont collé des messages en Soninké, Serbe, Turc, Arabe, Russe, Portugais… Si vous venez voir l’expo vous pourrez voir les photos, les messages et leurs traductions. Et il y a une petite surprise sur place !
Tu as quelques adresses favorites du côté de l’est parisien ?
J’aime beaucoup la Flèche d’Or depuis que le lieu a rouvert, il y a beaucoup d’initiatives solidaires et des collectifs intéressants, comme le collectif queer ObliQ qui propose de la préparation et distribution alimentaire en ce moment. Et en temps hors confinement, de super événements ! Sinon un peu plus haut (je suis nulle en orientation), j’adore la vue du belvédère de Belleville.
Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter dans les mois à venir, et pour une année 2021 qu’on espère bien différente ?
Me souhaiter personnellement : encore plein de photos, et plein de combats (gagnants) en photo ici et ailleurs. Et en général : plus de solidarité, et moins de fachos !
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Noémie Coissac
Profil Hans Lucas – Instagram
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