Les soignantes d’un EHPAD du 19e arrondissement se mobilisent pour leurs conditions de travail et leurs salaires

Les travailleuses de l’EHPAD COS Alice Guy, résidence située à deux pas du canal de l’Ourcq (19e), étaient en grève pour un troisième lundi consécutif afin de dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail et demander des augmentations de salaires.

Les employées de cet EHPAD de 102 lits ouvert en 2014 décrivent un quotidien devenu de plus en plus difficile au fil des derniers mois : cas de sous-effectifs chroniques, changements d’emplois du temps « sans concertation préalable », et salaires maintenus au strict minimum malgré les surcharges de travail constatées. Face à une direction et un service des ressources humaines qui « font la sourde oreille » à leurs préoccupations, elles se sont rassemblées pour un premier piquet de grève devant leur lieu de travail le 30 septembre dernier.

Une vingtaine de salariées de la résidence s’étaient de nouveau réunies ce lundi 11 octobre pour faire entendre leurs voix, cette fois devant le siège de la Fondation COS, face aux immeubles cossus du boulevard de Sébastopol. Soutenues par la CGT Santé & Action Sociale et l’Union locale CGT Paris 19e, elles ont repris en chœur leurs slogans en les accompagnant parfois de quelques pas de danse : « COS Alice Guy, soignantes maltraitées ! », « On en a marre ! », ou encore « Garcia démission ! » – du nom du directeur de l’établissement, nommé en février 2020.

La Fondation COS rassemble aujourd’hui une vingtaine de résidences médicalisées pour personnes âgées (dont quatre à Paris), mais aussi plusieurs maisons d’accueil dédiées au handicap ainsi que des centres de rééducation physique. Présent dans huit régions françaises, le groupe et ses adresses associées emploient près de 3 200 salariés. D’après son rapport d’activité 2020, il possédait l’an dernier 93 millions d’euros de fonds propres, tandis que ses produits d’exploitation représentaient près de 196 millions d’euros, avec un résultat final bénéficiaire.

À titre indicatif, le prix moyen d’un séjour en chambre seule à l’EHPAD COS Alice Guy s’élève à près de 2 700 euros par mois : près du double du salaire net évoqué par certaines employées du groupe présentes ce lundi. « Nous sommes des soignantes, des travailleuses ‘de la première ligne’, nous avons toujours été là pour les résidents pendant cette période difficile de pandémie. Nous souhaitons réaliser notre travail dans les meilleures conditions, pour la santé et le bien-être des résidents. Mais aujourd’hui, ces conditions ne sont pas réunies », expliquent les grévistes dans un communiqué distribué aux passants.

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Toutes évoquent un manque de considération croissant de la hiérarchie de l’établissement à leur égard, avec « des remarques négatives constantes » et une écoute déficiente et teintée de « mépris ». Elles citent notamment « un changement de planning à la dernière minute, et sans concertation, [qui] va rendre la vie des salariées très compliquée. Nous avons toutes organisé notre vie personnelle et familiale en fonction d’un planning, et celui-ci est modifié sans prendre en compte notre avis ! », poursuivent-elles, estimant par ailleurs que leur travail « doit être reconnu via une hausse de salaire », à même de refléter la quantité de tâches réalisées « dans des conditions difficiles ».

Les travailleuses de l’EHPAD Alice Guy ont également pu compter sur le soutien de représentants du syndicat Force ouvrière et de la conseillère de Paris (LFI) Danielle Simonnet, déjà présente lors du rassemblement précédent. Insistant sur les « revendications légitimes » des salariées mobilisées, majoritairement des aides-soignantes, l’élue de l’est parisien a estimé que la dégradation de leurs conditions de travail était aussi « une maltraitance pour les résidents ». La représentante insoumise a ainsi souligné qu’il arrivait aux employées d’être parfois « seulement trois pour trente résidents par étage », au détriment du temps et l’attention pouvant être consacrés aux personnes âgées accueillies.

Face au refus du dialogue de leur direction, les grévistes ont ensuite gravi les étages de l’immeuble afin de rejoindre les bureaux du siège de la Fondation COS. Son accès leur fut barré violemment, une soignante étant même poussée à terre au risque de provoquer une chute plus grave encore dans les escaliers voisins. Après un concert de sifflets et de chants devant une porte close, symbole d’une « communication totalement rompue », les travailleuses ont regagné le boulevard pour y être accueillies par un escadron de policiers tout aussi peu enclins au dialogue.

Les soignantes de l’EHPAD COS Alice Guy ne comptent pas pour autant relâcher leurs efforts. « Nous continuons notre mobilisation, dans l’intérêt des salariées et des résidents et de leurs familles », indiquent ainsi les grévistes et leurs soutiens de la CGT. D’après nos informations, l’inspection du travail et l’Agence régionale de santé ont été informées de la dégradation de la situation observée au sein de l’établissement. Après plusieurs victoires syndicales ces derniers mois à Paris, comme celles des femmes de chambre de l’hôtel ibis Batignolles ou des équipes du Monoprix République, de bonnes nouvelles pourraient-elles enfin s’annoncer pour d’autres travailleuses insuffisamment considérées, cette fois-ci dans le secteur de la santé et de l’action sociale ?

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