Suite à la mobilisation d’associations, le conseil d’arrondissement du 12ème a adopté un vœu appelant la ville de Paris à “mettre fin à l’accueil de salons d’exposition et de vente d’animaux de compagnie sur les sites dont elle est propriétaire”.
Présenté le 30 mars dernier par la majorité municipale de l’arrondissement sur proposition de Manon Havet, adjointe (Europe Écologie – Les Verts) à la maire du 12ème en charge de la transition écologique, des espaces verts, et de la condition animale, ce vœu a été soutenu par l’ensemble des élus de gauche réunis au sein du conseil. Les représentants du groupe conservateur Changer Paris ont été les seuls à s’y opposer, la conseillère Corinne Atlan-Tapiero évoquant “une société qui devient de plus en plus liberticide”, avec trois votes contre et deux abstentions.
Particulièrement mobilisée sur ce dossier, l’association Évolution Condition Animale (ÉCA) a salué “un pas important contre la marchandisation des animaux à Paris”. En février dernier, elle avait adressé avec une quinzaine d’organisations luttant pour la condition animale une lettre collective à Anne Hidalgo et Christophe Najdovski, son adjoint responsable de ce dossier, pour demander “la fin des salons et expositions d’animaux sur les sites appartenant à la ville de Paris”. Une pétition similaire rassemble aujourd’hui plus de 50 000 signatures.
Pour Fabienne Roumet, fondatrice de ÉCA, “ces événements sont destinés à déclencher les réflexes d’achats en présentant les animaux comme des marchandises. Ainsi, ils provoquent des achats impulsifs qui conduisent à la maltraitance, notamment à l’abandon. De plus, les conditions d’exposition sont incompatibles avec le bien-être des animaux. Ceux-ci sont soumis au stress, subissant bruits, odeurs, lumières violentes, la foule, souvent des manipulations pour attirer l’acheteur”.
Dans la capitale, plusieurs lieux sont aujourd’hui concernés par l’organisation de salons de vente d’animaux. La décision du conseil du 12ème n’est d’ailleurs pas un hasard : le Parc Floral de Paris, situé dans le bois de Vincennes et donc sur le territoire de l’arrondissement, accueille ainsi sur près de 15 000 mètres carrés l’événement Animal Expo – Animalis Show. Organisé à l’automne, il rassemble “800 chats, 400 chiens, 300 rongeurs, 3 000 poissons, 150 reptiles“, sans oublier des oiseaux.
La prochaine édition du salon est prévue pour octobre 2021. Si la ville est propriétaire du Parc Floral et de son espace événements, “sa gestion revient à un délégataire de service public”, a précisé Manon Havet lors de la présentation du texte voté le 30 mars dernier. Il s’agit du groupe GL Events, qui assure également l’animation du Palais Brongniart, et d’une cinquantaine d’autres lieux en France et à travers le monde. Confiée visiblement sans la moindre offre concurrente en dépit d’un marché évalué à 9 millions d’euros hors taxes, cette délégation de seize ans est encore valable jusqu’en 2031.
Le Paris Animal Show est pour sa part programmé au parc des expositions de la porte de Versailles (15ème arrondissement) les 12 et 13 juin prochain. D’après ses organisateurs, l’événement réunira “5 000 animaux dont 1 000 chats, 500 chiens, des poissons et des reptiles”. Le salon Chiens et Chats, qui se tient habituellement à l’Espace Champerret (17ème arrondissement), ne semble pas être prévu cette année. Constat étonnant : ces trois événements parisiens sont organisés par une même société, Exposalons, domiciliée sur la très ostentatoire avenue George V à deux pas des Champs-Élysées.
Après la décision de mettre fin au triste marché aux oiseaux de l’île de la Cité, confirmée en début d’année en conseil d’arrondissement puis en conseil de Paris, les associations espèrent que la municipalité sera désormais attentive au sort de ces autres animaux. “La mairie de Paris peut agir sur la programmation du Parc Floral et de la porte de Versailles”, rappelle ainsi Fabienne Roumet. La signature d’avenants aux contrats de délégation semblerait une possibilité : à l’automne dernier, la ville en avait fait usage pour proposer “des mesures d’accompagnement” et réductions de redevances en vue de soutenir GL Events “face à la crise sanitaire”. La situation apparaît plus complexe concernant le parc des expositions de la porte de Versailles, mais des leviers d’action existeraient là aussi, estime la fondatrice de ÉCA.
Le vœu adopté en conseil du 12ème arrondissement a pour bases d’autres textes votés par les élus parisiens, notamment le Plan Biodiversité de 2018 et le rapport de la mission Animaux en ville approuvé la même année par le conseil de Paris. Ce dernier préconisait notamment de réaliser “une campagne contre les achats impulsifs d’animaux de compagnie, à l’origine de nombreux abandons”, la ville s’engageant aussi à mettre en avant l’adoption et à soutenir les associations recueillant des animaux. Le texte adopté en conseil du 12ème arrondissement indique que “d’après les associations de protection des animaux, entre 60 000 et 100 000 chiens et chats sont abandonnés chaque année”.
Suite à l’adoption en première lecture de la loi contre la maltraitance animale, ce vœu précise enfin que la vente de chiens et de chats en animaleries devrait bientôt faire l’objet de contrôles plus stricts et pourrait même être grandement limitée. La difficulté de contrôles effectifs concernant la provenance des animaux exposés est également mise en avant par les élus du 12ème, le texte adopté le 30 mars soulignant l’impossibilité de “vérifier l’origine de tous les chiens vendus sur ce type de salons, et ce alors qu’on estime qu’environ un tiers des chiens achetés en France sont issus de trafics, importés illégalement, souvent sevrés précocement et élevés dans des conditions déplorables”.
Les élus se saisiront-ils de cette question à l’occasion du conseil de Paris, prévu à partir du 13 avril prochain ? D’après nos informations, des représentants d’au moins deux groupes politiques envisageraient de déposer un vœu en ce sens. L’attitude du principal groupe de la majorité, les socialistes de Paris en Commun, sera à n’en pas douter décisive. Dans le 12ème, plusieurs de ses membres influents ont soutenu le vœu adopté le 30 mars dernier : parmi eux, le premier adjoint d’Anne Hidalgo, Emmanuel Grégoire, et son adjointe à l’innovation, Pénélope Komitès, par ailleurs chargée de la biodiversité au cours de la précédente mandature.
Interrogé par notre rédaction, le cabinet de l’actuel adjoint à la condition animale, Christophe Najdovski, a jugé qu’il était “un peu tôt” pour répondre à nos questions quant à la position de l’équipe municipale. Après des rassemblements en février devant la mairie du 12ème, puis en mars au cours du dernier conseil de Paris face à l’Hôtel de ville en présence des élues Douchka Markovic (Parti animaliste – Groupe écologiste) et Danielle Simonnet (France Insoumise – opposition), ÉCA appelle pour sa part de nouveau à “l’adoption et la mise en œuvre” d’un vœu similaire à l’échelle de la capitale. Une mobilisation est prévue devant la mairie centrale mardi 13 avril à partir de 12h30.
Reconnaissant les “décisions courageuses” de la municipalité en vue de fermer le marché aux oiseaux et “d’accompagner l’évolution de l’activité des ménageries pour une meilleure protection des animaux”, l’association juge que cette demande relative à la fin des salons d’exposition et de vente “s’inscrit dans la continuité” de ces engagements. ÉCA et ses soutiens, estimant que “la ville de Paris doit être cohérente”, se feront de nouveau entendre pour rappeler que “les animaux ne sont pas des marchandises”.
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Photographie d’illustration : Manifestation organisée par l’association Évolution Condition Animale devant l’Hôtel de ville, en présence des conseillères de Paris Douchka Markovic et Danielle Simonnet.
9 mars 2021
© Évolution Condition Animale
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Empêcher ces salons qui favorisent l’achat impulsif, pourquoi pas.
On pourrait aussi se pencher sur la prolifération de jeunes chiens dans Paris, souvent avec des gens jeunes à l’autre bout de la laisse, visiblement le confinement a boosté le marché, je n’en ai jamais vu autant. Prétexte pour se balader après le couvre-feu ou souhait d’avoir un compagnon pendant des mois difficiles, je ne sais trop, mais qu’adviendra t-il de ces animaux une fois devenus adultes. Grosse inquiétude, le sujet n’a été abordé nulle part et pourtant ça saute aux yeux pour qui arpente Paris.